A trip to Gabon
Travel summary
GACC 2016
Trois ans après mon dernier séjour au Cameroun, l’envie de repartir taquiner les biotopes de nos chers protégés grandissait un peu plus chaque jour. Mais cette fois, je souhaitais découvrir un nouveau pays. Et pour cela, quoi de mieux que le Gabon pour aller chercher les killis ?
Le Gabon, traversé par l’équateur, est un pays d’Afrique centrale recouvert à plus de 80% de forêt. Cette ancienne colonie française (jusqu’en 1960) est aujourd’hui un des pays d’Afrique noire le plus sûr, et riche, grâce au pétrole notamment. Le prix de la vie y est plutôt élevé, comparé à ses voisins. Mais surtout, le pays possède de nombreux reliefs intéressants (jusqu’à 1000m) et le climat est de type équatorial : très humide et chaud (mais pas trop !). La diversité écologique est donc extrêmement importante. Les conditions sont réunies pour y trouver les killis en abondance.
Mon objectif n’était pas de partir pour ramener du poisson à tout prix, mais plutôt d’essayer d’aller dans des zones encore peu ou pas connues. Après de nombreuses semaines à étudier les aires de répartitions et les bassins hydrographiques, mon choix s’arrête sur la zone ouest du pays.
Je rencontre cependant pas mal de problèmes (administratifs) pour organiser le voyage et pouvoir pêcher sur place sans soucis. Alors que j’étais sur le point d’abandonner le projet pour cette année, Laurent Chirio, avec qui j’étais en contact depuis quelques temps, me propose de le rejoindre dans son expédition… sur la côte ouest ! La réflexion n’a pas lieu d’être, et c’est avec grand plaisir que je lui dis oui. Un mois après, nous étions à la capitale, Libreville !
Le 4 juillet, nous rejoignons Thibault directement sur place. Le lendemain matin, nous partons en direction du sud, en compagnie de notre chauffeur Wen. Notre zone d’action pour près de 3 semaines : les nouvelles pistes forestières situées entre Port-Gentil, Lambaréné, Mayumba, Ndendé et jusqu’à la frontière avec le Congo. Le voyage va nous réserver son lot de surprises, bonnes comme mauvaises… bienvenue en Afrique !
La première chose qui me frappe est la préservation de la forêt. La forêt primaire est là, immense, en bon état, et pour l’instant assez épargnée par les exploitations forestières. En témoigne l’omniprésence des traces d’éléphants (par milliers certainement) dans toute la zone. Nous n’aurons pas la chance d’en voir, mais nous nous sentirons régulièrement observés.
En revanche, sur des pistes peu fréquentées comme nous empruntons, nous observerons quotidiennement différents singes, antilopes, serpents, chevrotains (etc.), traverser quelques mètres devant nous. Sans oublier, rapaces, pélicans, ibis et autres oiseaux en abondance !
Ce sont d’ailleurs ces mêmes animaux que nous retrouvons dans nos assiettes des petits restaurants du soir. Du crocodile au python, en passant par l’antilope ou le sanglier, sans oublier le poisson braisé et les traditionnelles brochettes de poulet, une chose est sûre, nous ne manquions pas de nourriture ! Mais surtout, c’était bon ! OK, une antilope nous a tous rendu malade un jour…
Dans cette région, nous pouvons rencontrer principalement : Aphyosemion, Aplocheilichthys, Epiplatys et Plataplochilus. Ce dernier genre étant au centre de l’étude de Laurent (et par extension, de Jean-François Agnèse qui adore « ces poissons gris »), les Plataplochilus vont être omniprésent tout au long du périple. Ils vont faire partis des bonnes surprises de l’expédition.
Concernant les Aphyosemion, deux espèces sont très largement représentées : Aphyosemion australe qui se situe sur une bande côtière de 30Km environ, et Aphyosemion escherichi à l’intérieur des terres. Ce dernier est cependant trouvé très régulièrement en sympatrie avec d’autres Aphyosemion. Nous espérons donc trouver d’autres espèces, dans les différents reliefs notamment, ayant de faibles aires de répartitions.
Les Epiplatys sont eux aussi très bien représentés : ansorgii, huberi, sexfasciatus et surtout singa. Nous aurons d’ailleurs bien souvent au cours du voyage du mal à définir avec certitude l’espèce pêchée, tant il reste du travail à faire sur ce genre.
Enfin, les Aplocheilichthys seront bien là, mais pas uniquement en zone côtière !
Afin de simplifier le récit, je vais découper le voyage en quatre parties, qui correspondent aux quatre grandes étapes du voyage.
Première partie
De Lambaréné à Mandji, avec une première halte à Mouila.
Après avoir pêché quelques Aphyosemion striatum et boehmi non loin de Lambaréné, nous faisons un détour vers Mouila puis Guietsou, avant de remonter vers Mandji. Ce détour sur une route de montagne sera l’occasion de trouver un Aphyosemion aff. primigenium singulier. Sa rareté dans le ruisseau et son hyper agressivité feront que je ne pourrais en ramener qu’un couple chez moi. Il ne reste plus qu’à croiser les doigts et à en prendre soin.
Nous trouverons également (dans le même ruisseau) un Epiplatys sp., très similaire au « sp. Sindara » mais dans un tout autre bassin, et un nouveau Plataplo. Ce détour a donc été très fructueux !
De retour vers Mandji, la pêche est plutôt orientée Plataplo, et s’avère encore une fois très intéressante. Les Epiplatys ne seront pas en reste non plus : ansorgii et huberi.
A noter que nous devrons faire réparer la voiture le lendemain matin car un amortisseur a lâché.
Deuxième partie
Direction la côté ouest et sa mégalopole Omboué.
Le voyage est plus long que nous pensions. Après être parti tôt le matin, nous sommes arrivés tard le soir. Et le périple par les camps pétroliers n’est pas fait pour gagner du temps… Mais la route est splendide. Nous sommes pendant 200Km au cœur de la forêt. Une forêt la plus part du temps intacte, où les traces d’animaux sont omniprésentes. Côté pêche, une fois encore, nous allons jongler entre surprises et déceptions.
Déceptions du côté des Aphyo notamment, car nous allons vite nous apercevoir que Aphyosemion australe et escherichi sont partout. Et au final, il n’y aura pas une autre espèce comme nous l’espérions. Mais les surprises sont aussi présentes. Nous pêcherons un Aphyosemion australe bien loin de l’océan et un boehmi bien plus au sud que l’on ne pouvait l’imaginer. Quant aux Plataplo, c’est encore une fois l’orgie, et nous en pêchons des différents à chaque fois ou presque !
Une fois à Omboué, dans une ambiance très chaleureuse et accueillante, nous tenterons de pêcher aux alentours, jusqu’à Port-Gentil. Mais sans véritable succès. Nous trouverons Aphyo australe et Aplo spilauchen, sans grande surprise.
Troisième partie
Le transfert, parfois dangereux, d’Omboué à Tchibanga.
Il fallait maintenant faire le trajet inverse, et partir du côté de Tchibanga. Mais ce trajet aurait bien pu être le dernier de notre vie. Afin de rallier Mouila pour une halte, nous avons décidé de passer par la montagne et les exploitations forestières. La zone était alléchante puisque peu de personnes l’avaient prise jusque-là… et l’on va comprendre pourquoi assez rapidement. Je vous passe les détails, mais il nous aura fallu un chauffeur extraordinaire pour nous éviter une collision frontale avec un grumier lancé en pleine montagne, et la chute dans le ravin. Nous avons vu passer le camion et les grumes à quelques centimètres du pare-brise… Encore sous le choc, la trentaine de kilomètres qui nous restaient à faire sur ces pistes nous ont paru durer une éternité !
Nous avons tout de même pêché de belles choses, et notamment le même Epiplatys sp que précédemment vers Guietsou, un nouveau Plataplo orange et magnifique (que j’ai pu ramener vivant en France, mais qui n’aura pas tenu avec la canicule malheureusement) ainsi qu’un Aphyo aff. primigenium différent de celui de Guietsou.
Quatrième partie
Tchibanga, entre reliefs, savane… et problèmes !
Nous voilà dans la dernière partie du voyage. Le paysage change. Implantée dans la savane et bordée par les reliefs, Tchibanga est la plus grande ville de la région. Nous avons quatre objectifs dans cette zone : les reliefs de l’ouest, ceux de l’est, et la savane au nord et au sud.
Nous commençons donc par l’ouest et pêchons dans les montagnes. Encore une fois, les Plataplo sont différents des jours précédents. A ce moment-là, nous souhaitons bien du courage à Jean-François pour faire le tri dans tout ça ! Mais en ce qui concerne les Aphyo… c’est le désert ! Nous ne rencontrons aucun biotope propice.
Nous enchainons par le sud en direction de la frontière avec le Congo. La savane regorge de petits ruisseaux descendants directement des reliefs voisins. Bis repetita : nous faisons le plein de Plataplo, mais aucun Aphyo ! Même pas un escherichi ou un australe à se mettre sous la dent…
Après un nouveau changement d’amortisseurs, nous partons donc dans les montagnes de l’est, avec comme objectif d’emprunter une piste forestière qui s’enfonce assez loin dans ces reliefs. Après une 30aine de kilomètres, nous nous retrouvons bloqués sur la piste : le seul pont est cassé, impossible de passer. Nous en profitons pour faire un point de pêche avant de faire demi-tour et enfin, nous trouvons de l’Aphyo.
Seulement après 500m, une rotule de la voiture nous lâche. Il est 15h. Les quelques mauvaises pistes auront eu raison d’un véhicule vieillissant. Par chance, une voiture qui passait par là ramène le chauffeur et Laurent en ville pour aller chercher de l’aide. Le chauffeur reviendra avec un mécanicien peu après 20h. Nous rentrons avec le taxi et laissons Wen et son acolyte, confiants, réparer la voiture. A minuit, les nouvelles ne sont pas bonnes. La seconde rotule a lâché. Ils ne peuvent réparer, et passeront la nuit en brousse.
Le lendemain midi, nous devons prendre une décision. Libreville est à 2 jours de voiture. Mon avion est dans moins de 3 jours. La voiture n’est pas réparable dans les 24h. Nous abandonnons donc Wen ici, et rentrons en transports en commun (épique) jusqu’à Mouila, puis en Taxi jusqu’à la capitale.
Dans la précipitation, nous oublions pas mal de choses dans la voiture, et notamment les filets. La pêche semblait donc compromise pour cette fin de voyage. Mais c’était sans compter sur notre imagination pour fabriquer une nasse de fortune… qui nous permettra de pêcher notamment au Cap Esterias, dans la forêt de la Mondah.
L’heure du départ est venue. Après quelques heures à préparer les poissons et une dernière petite frayeur à l’aéroport (merci Thibault pour ton chevalet !), le retour se passera sans encombre et les pertes à l’arrivée seront négligeables.
Bien qu’un peu frustrant au niveau des Aphyosemion, ce premier voyage au Gabon est tout de même une franche réussite. L’objectif principal est totalement atteint, avec une quantité invraisemblable de Plataplochilus différents pêchés tout au long du voyage.
Il me restera en mémoire des paysages tous plus beaux les uns que les autres, une faune extraordinaire, de personnes bien souvent accueillantes (en brousse) ou indifférentes à notre présence, des bonnes parties de pêche et de rigolades, de bons repas, et j’en passe.
Bref, vous l’aurez compris, ce voyage est, je l’espère, le premier d’une longue série. En croisant les doigts pour que, dans les années à venir, cette magnifique nature reste aussi intacte que ce que j’ai eu la chance d’observer cette fois-ci…